Agent prestataire de services de paiement : entre ambition et conformité ?

agent prestataire de services de paiement
Les plateformes qui souhaitent collecter des fonds pour le compte de tiers peuvent choisir d'être mandatées par un établissement de paiement agréé. Largement répandu en France, le statut d'agent prestataire de services de paiement implique toutefois une prise en responsabilités significative.

S'appuyant sur notre expérience de Prestataire de services de paiement (PSP) et l'évolution de la doctrine ACPR, cet article propose un éclairage complet pour comprendre les enjeux du statut, évaluer sa comptabilité avec votre modèle et maîtriser les étapes de sa mise en œuvre.

Table des matières

Choisir le modèle d’agent plutôt qu’établissement agréé

Devenir agent d’un établissement de paiement, c’est adopter une position intermédiaire stratégique entre :

  • Le modèle « partenaire technique » (simple intégration d’un PSP par API),
  • Et le modèle « établissement agréé » (avec fonds propres, capital réglementaire et exigences prudentielles lourdes).

Le statut d’agent prestataire de services de paiement (agent PSP) permet à une entité d’opérer sous l’agrément d’un établissement agréé, tout en conservant maîtrise et autonomie opérationnelle sur des fonctions clés, telles que : la collecte, la ventilation et le reversement des flux. Il implique en parallèle la mise en œuvre de dispositifs continus relatifs à la lutte contre les activités frauduleuses ainsi qu’une connaissance et une supervision rigoureuse des sous-marchands.

Concrètement, ce statut :

  • engage la responsabilité réglementaire de la plateforme,
  • suppose une organisation interne solide et structurée,
  • s’inscrit dans une relation encadrée et exigeante, avec le PSP et le régulateur.

Le cadre réglementaire en vigueur en France

Ce statut repose sur la transposition en droit français de la Directive sur les services de paiement (DPS2), ainsi que sur les dispositions du Code monétaire et financier (articles L.523-1 et suivants) qui stipulent que l’agent agit au nom et pour le compte d’un établissement agréé, lequel reste pleinement responsable vis-à-vis du régulateur.

Ce statut vise à encadrer la fourniture de services de paiement par des acteurs non bancaires via des intermédiaires / prestataires tiers agréés.

L’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR), rattachée à la Banque de France, est la seule autorité compétente pour enregistrer les agents prestataires de services de paiement. Une plateforme ne peut pas déposer de candidature seule : elle doit impérativement passer par un établissement agréé (EP ou EME).

Dans le cadre de la candidature d’une plateforme, l’établissement de paiement :

  • constitue le dossier d’enregistrement en collaboration avec l’agent et le dépose auprès de l’ACPR,
  • assure les échanges avec l’ACPR et répond aux demandes de précision,
  • informe la plateforme de la décision.

Les conditions requises pour être agent PSP

Avant même de parler enregistrement, la plateforme doit prouver sa solidité et maturité organisationnelle au regard de la réglementation prudentielle.

PiliersExigences principales
Structure juridique et gouvernanceSociété constituée (SAS, SA, SARL…), gouvernance identifiée, dirigeants compétents et honorables
Moyens humains et techniquesCapacité à surveiller les flux, dispositif de lutte contre le blanchiment d’argent et financement du terrorisme (LCB-FT), infrastructure sécurisée et traçable
Engagement contractuelSignature d’un contrat d’agent PSP + éventuels contrats d’externalisation si certaines fonctions critiques le nécessitent

Notre retour d’expérience en tant qu’établissement de paiement agréé montre que la réussite, mais aussi la rapidité de l’enregistrement ACPR dépend souvent de la bonne structuration de l’organisation de l’agent.

Un rôle opérationnel et réglementaire à part entière

Obtenir l’enregistrement n’est pas une fin en soi. C’est avant tout l’entrée dans une activité régulée qui engage fortement la responsabilité de la plateforme, notamment en matière de :

Vigilance réglementaire (LCB-FT)

  • Identifier les sous-marchands (KYC/KYB) et vérifie leur activité et la cohérence des flux,
  • Surveiller les opérations inhabituelles et remonter les alertes à l’EP,
  • Former ses équipes aux procédures.

Transparence envers les sous-marchands

  • Communiquer clairement sur les délais et conditions de mise à disposition des fonds,
  • Permettre aux sous-marchands d’accéder et consulter leurs comptes de paiement,
  • Définir les modalités de règlement en accord avec les sous-marchands.

Une relation tripartite : agent, établissement et régulateur

L’agent prestataire de services de paiement n’agit jamais seul : il s’inscrit dans une relation contractuelle étroite avec le PSP (juridiquement et opérationnellement), sous la supervision de l’ACPR.

Un cadre contractuel précis

Le contrat d’agent définit :

  • le périmètre des services délégués,
  • les règles de conformité et de sécurité obligatoires,
  • les modalités de supervision (reporting, audits, alertes).

L’établissement de paiement suit continuellement les volumes traités par la plateforme, les incidents et les anomalies. Des audits peuvent être réalisés à tout moment.

Une gouvernance quotidienne encadrée

Devenir agent prestataire de services de paiement, c’est aussi adopter une organisation et une culture conformité quotidienne, avec :

  • un référent conformité (LCB-FT, reporting, suivi réglementaire),
  • un contact technique pour la sécurité et la gestion des incidents,
  • des procédures formalisées pour le KYC/KYB, la surveillance des flux et la gestion des anomalies.

Chez CentralPay, nous avons instauré une politique rigoureuse qui encadre nos agents, de l’instruction du dossier auprès de l’ACPR jusqu’à leur supervision opérationnelle continue afin de garantir le strict respect de la doctrine du régulateur.

Un processus d’enregistrement strictement encadré

En 2024, 3 508 agents PSP ont été enregistrés en France, soit une baisse de 20 % par rapport à 2023 et de près de 70 % par rapport à 2022¹. Cette contraction reflète un durcissement des exigences du régulateur vis-à-vis des plateformes.

Cette exigence accrue se manifeste effectivement dès processus d’enregistrement, qui suit une procédure rigoureusement encadrée par le régulateur :

Étape 1 : Préparation et présentation du dossier

Cette étape est décisive : le dossier doit permettre à l’ACPR d’évaluer la crédibilité et la solidité du projet. On y retrouve notamment :

  • la description du modèle économique et des services fournis,
  • les statuts, organigrammes, actionnariat,
  • les documents légaux et financiers récents,
  • les informations sur les dirigeants,
  • et les projections d’activité (flux, volume de marchands, types d’opérations).

Cette phase implique souvent des allers-retours ente la plateforme et le PSP pour garantir la conformité du dossier avant son dépôt officiel.

Étape 2 : Instruction par l’ACPR

Une fois le dossier déposé, l’ACPR engage une instruction. Elle vérifie notamment la cohérence globale du projet, la compétence de la direction, la solidité du dispositif de vigilance et la capacité technique / opérationnelle à gérer les flux.

Des demandes de précision sont souvent adressées par le régulateur. Les premières interviennent généralement sous 30 jours, le délai pouvant s’étendre à 2 mois. À noter que tous les échanges passent par l’établissement agréé, seul interlocuteur de l’ACPR.

Étape 3 : Enregistrement public

Si l’évaluation est positive, la plateforme est officiellement enregistrée en tant qu’agent prestataire de services de paiement. Son nom est alors publié sur le registre public REGAFI et un numéro d’enregistrement lui est attribué. Ce dernier doit figurer dans les CGU, les documents commerciaux et tout support contractuel ou réglementaires associés aux services de paiement.

À compter de cette validation, la plateforme peut exercer légalement son activité en tant qu’Agent PSPS, sous la supervision de son établissement partenaire.

On constate que la réussite, mais aussi la rapidité de l’enregistrement ACPR dépend souvent de la bonne structuration de l’organisation de l’agent – Natacha Pedroso

La DSP3, une nouvelle ère d’exigence pour les agents

L’Union européenne prépare la DPS3 et le Payment Services Regulation (PSR), qui remplaceront la DSP2 dans les prochaines années. Ces textes viendront :

  • restreindre les exemptions (notamment celle d’agent commercial),
  • renforcer les exigences de gouvernance et d’audit,
  • harmoniser les conditions d’enregistrement dans toute l’Europe,
  • intensifier la supervision transfrontalière.

Pour les plateformes, cela signifie qu’il sera encore plus important de choisir un partenaire agréé solide et de bâtir un modèle de conformité pérenne.

Devenir Agent prestataire de services de paiement avec CentralPay

Devenir agent PSP, c’est accepter d’endosser un rôle régulé et exigeant. Notre expérience nous a appris que les projets les plus performants sont ceux qui anticipent cette réalité dès le départ, avec une gouvernance claire, des équipes formées et une relation de confiance solide avec leur PSP partenaire.

C’est une alliance entre ambition commerciale et rigueur réglementaire.
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Vous explorez le sujet pour votre plateforme ou marketplace ? Vous envisagez de devenir Agent prestataire de services de paiement ? Nos équipes vous accompagnent dans la structuration de votre dossier.


¹ ACPR, Rapports annuels (2022, 2023 et 2024) 

Image générée par une intelligence artificielle