Ne pas sous-estimer l’importance du paiement marketplace
Au quotidien, le paiement marketplace est critique à deux niveaux :
- L’expérience client, qui influe directement la conversion
- L’orchestration interne, qui garantit la rentabilité et la conformité
Optimiser l’expérience payeur
Le paiement est la première interface de confiance entre acheteur et plateforme. Sur une marketplace B2B ou B2C, comme en e-commerce, les priorités sont claires :
- Maximiser le taux d’acceptation
- Proposer les bons moyens (paiement par carte bancaire, virement SEPA, initiation de paiement…) et modes paiement (Apple Pay, Google Pay, one-click…)
- Simplifier le checkout pour limiter l’abandon de panier
Un module de paiement efficace doit être rapide, fluide et sécurisé. L’enjeu n’est pas de multiplier les options, mais de proposer celles adaptées au profil des acheteurs : panier moyen, fréquence d’achat, pays cibles. Un module de paiement efficace doit permettre d’accélérer la conversion en ligne.
Orchestration des flux et reversements
Sur une marketplace, une seule commande peut impliquer plusieurs vendeurs. Le client règle la plateforme, qui redistribue ensuite automatiquement les fonds sur le compte bancaire de chaque marchand : c’est le reversement (ou split payment).
Son paramétrage conditionne la monétisation : calendrier de reversement, règles de commission, frais annexes (logistique, service client). La plateforme doit aussi pouvoir gérer les onboarding de nouveaux marchands, les réserves de sécurité (en cas de remboursements), les litiges et le pilotage comptable.
Comme les fonds appartiennent aux vendeurs, et non à la plateforme, des règles strictes s’appliquent. Elle ne peut gérer seule ses flux de paiement marketplace, mais doit obligatoirement s’appuyer sur un Établissement de paiement agréé (aussi appelé Prestataire de Services de Paiement – PSP).
Encaissement pour compte de tiers : un cadre réglementaire strict
L’article L314-1 du Code monétaire et financier défini l’encaissement pour le compte de tiers comme la réception et le traitement d’opérations de paiement, destinées à être reversées à un bénéficiaire. Toute marketplace est donc pleinement concernée.
Cependant, aucune plateforme n’est autorisée à encaisser l’argent des acheteurs, pour le compte des marchands, sans agrément. Elle doit travailler avec Établissement de paiement (EP) agréé.
Ignorer ce cadre, c’est prendre le risque de sanctions de l’ACPR, mais aussi d’éroder la confiance des marchands et des payeurs.
Quel rôle joue un Établissement de paiement dans le paiement marketplace ?
Un Établissement de paiement est une société agréée par l’ACPR pour fournir des services de paiement : exécution d’opérations de paiement (carte, virement bancaires, prélèvements…), acquisition pour le compte de commerçants, émission d’instruments de paiement (cartes de paiement, compte de monnaie électronique…).
Ces établissements sont soumis au strict respect des règles imposées par le régulateur (ségrégation et protection des fonds des clients, lutte contre le blanchiment d’argent, reporting régulier…). En d’autres termes, c’est un métier à part entière où la rigueur réglementaire compte autant que la technologie.
Accepter des paiements sur sa marketplace : trois possibilités
Le choix du modèle conditionne la trajectoire technologique et business d’une plateforme.
Devenir Agent d’un Établissement de paiement
L’agent agit au nom et pour le compte d’un EP agréé. Il peut distribuer et utiliser ses solutions de paiement sans posséder d’agrément propre. L’Agent doit être déclaré auprès de l’ACPR, former ses équipes et appliquer les règles LCB-FT définies par l’Établissement de paiement.
Ce modèle est adapté aux marketplaces qui veulent accéder rapidement au marché, tout en gardant un cadre conforme pour encaisser les paiements, ainsi qu’une proximité avec leurs marchands.
Intégrer un PSP « marketplace-ready »
Des acteurs comme Stripe ou CentralPay proposent une API et des modules conçus pour les places de marché. Le PSP partenaire gère lui-même la conformité et l’orchestration des flux, sans contraintes réglementaires pour la plateforme.
Ce modèle est adapté pour lancer ou développer une marketplace B2B ou B2C early-stage, en bénéficiant des fonctionnalités nécessaires (split, reversements, onboarding, KYC/KYB…), mais sans équipe réglementaire interne.
L’agrément EP
Certaines plateformes choisissent de devenir elles-mêmes Établissement de paiement pour internaliser leur gestion des flux. Ce modèle donne un contrôle total, mais suppose un investissement important en capital, en gouvernance et en conformité.
Ce modèle est adapté aux marketplaces, disposant d’un back-office solide et d’équipes spécialisées capables de gérer l’ensemble du système de paiement et de conformité.
Le paiement marketplace n’est pas qu’un sujet technique. C’est toute l’infrastructure qui soutient votre modèle économique, assure la confiance des vendeurs en ligne et sécurise la croissance.
Par ailleurs, les projections McKinsey 2024² confirment la montée de services comme le virement instantané, ouvrant la voie à des reversements en temps réel vers les marchands, une réduction du risque de fraude et une meilleure gestion du cash-flow. La question n’est donc plus “quel PSP choisir ?” mais “quel modèle de paiement peut soutenir ma croissance sur les 5 prochaines années ?
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¹ Mirakl – State of Online Marketplace Adoption (2022)
² McKinsey – Global payments in 2024: Simpler interfaces, complex reality (2024)